• Claude Vinh-San (et le Jazz Tropical)

      

    Claude Vinh-San (et le Jazz Tropical)Claude Vinh-San fait partie de ces immuables références citées dans les discours avertis, systématiquement présent à l'esprit des amateurs chevronnés de musique réunionnaise, dès qu'on aborde la création musicale des années 50 à 70. Les années 80 marquent un tournant qui ne laissera qu'une place infime (dans le meilleur des cas) à ces hommes de bals populaires, d'orchestres, de foules et de piétinements enlassés.

    Il est un des fils du prince Vinh San, en réalité dernier empereur d'Annam (Vietnam actuel) puisqu'il ne désavouera jamais son titre jusqu'à sa mort. Cet illustre personnage, exilé à La Réunion pour cause de brouille avec le Protectorat français, a marqué très fortement le jeune Claude qui n'a jamais céssé de lui rendre hommage, d'honorer sa mémoire.

    Toujours en activité avec le Jazz Tropical, Claude Vinh-San (ou Nguyen Phuoc Bao Vang tel qu'on le nommerait au Vietnam) s'est le fait le précurseur d'un genre qui ne survit plus qu'à travers lui.

      

      

    Son répertoire est composé de chansonnettes créoles comme il aime à le rappeler, aux instruments débordant d'allégresse, accompagné par un accordéon  musclé et cajoleur. La musique s'installe posément, à coup de frottements répétés et prépare le terrain pour une guitare aux accents entêtants ou une voix, qui a l'air de se trâiner et de s'articuler comme on réciterait une dictée.

    C'est une leçon de maître à laquelle assistaitt les quelques privilégiés du Rio, salle de bal à Saint-Denis mais aussi lieu de frictions entre le gratin du chef-lieu, ses distractions et les aspirations du petit peuple. Elle servait également aux réunions du Parti Communiste Réunionnais à cette époque (1), ou là aussi l'administration française représentée par l'ordonnance Debré se confronte à une insurrection politique vivace (en très et peut-être mal raccourci : départementalisation, assistanat et colonialisme déguisé VS autonomie pour La Réunion, La Réunion aux réunionnais etc). Claude Vinh-san et son orchestre joueront plus tard pour l'Hôtel d'Europe, lieu de fêtes tout aussi renommé.

     

     

     

    Claude Vinh-San a su s'inspirer de sonorités exotiques en vogue (bolero, rumba, biguine...) mais a aussi, fort heureusement, puisé dans le patrimoine musical qui grouillait sur le seuil de son inspiration et quotidiennement autour de lui pour construire son succès. Mieux encore, sa contribution en apparence banale; simple animation de soirées et d'évènements comme il était alors coutume, s'est révélée enrichir de couleurs nouvelles l'arc-en-ciel musical réunionnais.

    Un Eden pour les amateurs de danses; qu'ils fussent rigoristes des codes et respectueux de la mesure ou éperdument folâtres; les tempos se présentaient à eux, à leurs pas éperonnés avec foisonnement. Car sa musique comme celle des orchestres alors actifs était précisément faite dans ce but : faire danser. De nos jours, la musique locale s'est dissocier de cet attribut. Les rassemblements populaires (ou non) n'ont plus vocation à faire tanguer le corps de l'auditoire, à le transporter par deux, par trois, disposé en ronde ou en losange dans un pur moment jubilatoire ! L'heure est à l'écoute, à la réception statique, destructurée et individuelle. Une interview de Bernadette Ladauge accordée au N°46 du magazine Muzikalité (très intéressant par ailleurs), édité par Runmuzik, fait état de cet abandon qui met en réel péril un pan historique du patrimoine musical et culturel réunionnais.

     

     

     

    Les bals d'antan semblent bel et bien avoir pris la poussière, mais Claude Vinh-San et son accordéon chromatique sont comme ces étoiles du soir, lumineuses, éternelles, rasurrantes. Il en va de même des images qu'il nous lègue. Les "Bonbons coco" et bonbons fondants aux saveurs sirupeuses et sucrées; le vendeur clamant, vantant les vertus de ses chouchous auprès d'une dame à l'oeil expert un dimanche de marché; le "pied d'camélias", sépulcre symbolique préféré aux caisses de bois mort.

    Parfois la mélodie ne comporte qu'une phrase ("Missié Satan") répétée; souvent elle se passe de mots pour se dérouler avec majesté. Claude Vinh-San a dans son répertoire un nombre important de compositions instrumentales, genre lui aussi tombé en désuétude. A la sauce du Jazz Tropical, elles acquierent un langage magnifié par le ralé poussé, son tournoiement vous emporte comme une impossible brise. N'ayons plus peur de nous faire emporter, allons ensemble reconquérir les bals et les salons, sur des airs signés Vinh-San !

     

     

     

    + d'infos : http://www.runmuzik.fr/patrimoine/musiciens/claude-vinh-san.html

    http://www.mondomix.com/fr/news/claude-vinh-san-et-le-jazz-tropical

    (biographie assez complète) http://www.clicanoo.re/141475-claude-vinh-san-ne-prince-nguyen.html

    http://www.lequotidien.re/actualites/la-reunion/26240-patrimoine--claude-vinh-san-et-le-jazz-tropical-ode-a-la-chansonnette-creole.html

    http://www.lesinrocks.com/musique/critique-album/claude-vinh-san-et-le-jazz-tropical/

    pour écouter : http://www.deezer.com/fr/album/274614

    L'histoire du prince Duy Tan, père de Claude Vinh-San (site archi-complet): http://vinhsan.free.fr/Introduction.htm

     

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